• Les dagues, des armes blanches à double tranchants qui ne m'étaient pas du tout familier. Et pourtant il fallait que je gagne ce duel, je ne pouvais me permettre de perdre. 

    Le principe d'un duel de dague était simple: il fallait les lancer pour toucher l'adversaire et celui qui fera couler le premier sang, gagnera. Mais les dagues, c'était surtout de la pratique, encore et encore. Un débutant n'avait pas la moindre chance de gagner.

    On m'avait donné 6 dagues: deux étaient attachés à mes chevilles, deux autres dans ma ceinture et je tenais les deux dernières dans mes mains.

    La cloche sonna, et Shohei lança la première dague que j'évitais de justesse. Il prit une des dagues de ses chevilles et m'attaqua encore une fois: cette dague coupa une mèche de mes cheveux.

    Je lançais une dague qui s'écrasa lourdement contre le sol, je l'avais raté d'un mètre. Il savait à présent que les dagues n'étaient pas mon point fort et il sourit, menaçant.

    Il lança deux dagues d'un coup, une frôla ma joue sans la blesser ce qui le fit ruminer. Je m'abaissais pour récupérer une des dagues sur mes chevilles et la lança si vite qu'il eut du mal à l'éviter, ce qui me redonna espoir.

    Il me restait 4 dagues alors qu'il ne lui en restait que deux. Je lançais donc 3 dagues d'un coup et au moment où j'allais lancer ma dernière dague, ma tête dévia vers la gauche pour croiser le regard de l'héritier. Une douleur tranchante traversa ma joue et un liquide coula dans ma bouche, un goût de fer. Je touchai ce liquide, et le regardai avec étonnement. Il était rouge. Du sang. Je venais vraiment de perdre le duel? Je tournais mon regard vers l'Empereur qui ne me regardait même pas, il lâcha un petit mot à l'arbitre avant de se retourner vers le château, et sa cour le suivit. 

    Anzai par contre, me regardait. Et il souriait. Je ne savais pas qu'est ce que ça voulait dire et je ne voulais vraiment pas le savoir. J'essuyais le sang sur mes vêtements en le regardant droit dans les yeux. 

    * * * 

     

    Je regardais mon reflet dans la glace: de la sueur coulait sur mon froid, mes cheveux détachés collait à mon visage fatigué et j'avais bel et bien une entaille à la joue. Cette entaille venait de me faire perdre. 

    flashback 

    - L'Empereur m'a donné l'ordre de vous faire sortir du château au plus vite. Il ne veut plus vous revoir. 

    - Je pense que je l'avais compris, mais merci de me prévenir, dis-je en essuyant ma joue avec une serviette imbibée eau. 

    Le garde s'éloigna et je soufflai un bon coup. Je regardais de loin mon adversaire qui rangeait ses armes. Je ne préférais pas trainer, ce Shohei ne semblait pas digérer ce combat, car même si il en sortait victorieux de façade, le meilleur soldat de l'armée avait quand même perdue 2 combats sur trois. 

    fin du flashback 

    - Le prince Anzai souhaite s'entretenir avec vous. Il vous attend dans le petit salon. 

    - Le petit salon?  

    - Un garde vous y conduira. 

    Pourquoi voulait-il me voir? Je lui étais reconnaissante de m'avoir aidé - si je pouvais appelé ça comme ça- en convaincant l'Empereur, mais j'avais perdue et même si ma fierté en prenait un coup je l'acceptais. 

    - Mademoiselle? Êtes-vous prête?  

    - Oui. 

    Le garde me fit traverser nombreux couloirs et salles, toutes différentes et d'une richesse incalculable avant d'arriver dans un salon assez intime: le sol était en tatami, une table basse, quelques coussins, un accès à un balcon par des portes coulissantes en bois, un paravent rouge et quelques statues. Rien d'extravagant, ce qui m'étonnait car l'héritier semblait justement être un prince qui profitait pleinement de sa condition. 

    - C'est le salon du prince? Il n'est pas très décoré. 

    Le garde ignora ma remarque et me dit simplement d'attendre. Au bout d'une demi heure, une porte s'ouvrit enfin, laissant entrer le Prince Anzai dans toute sa splendeur suivit d'un autre garde. 

    - Laissez-nous je vous pris. 

    Le garde hésita, me jaugea du regard puis partit enfin. 

    - Vu la scène que vous nous avez offert aujourd'hui, ne vous étonnez pas que l'on ne vous fasse confiance. 

    - Je ne m'étonne de rien... votre altesse. 

    Il sourit légèrement à cette appellation.  

    - Vous me semblez bien moins rebelle que à notre première rencontre. C'est-à-dire il y a quelques heures. 

    - Je ne savais pas qui vous étiez. 

    - Et cela change quelque chose désormais?  

    - C'est-à-dire que... si je ne fais pas attention à mes paroles vous pouvez donner l'ordre de me couper la tête. Et je préfère que celle-ci reste attachée à mon corps. Mais allez droit au but, pourquoi m'avoir demandé ? 

    Il me dévisagea quelques secondes avant de sourire étrangement. 

    - Vous maniez étrangement bien les armes. Est-ce bien votre père qui vous a appris cet art? 

    Je fronçais les sourcils et répondit doucement: 

    - Oui... 

    - Mais encore? 

    Que voulait-il m'entendre dire?  

    - Je vous ai demandé d'être direct... Monseigneur, rajoutais-je au dernier moment pour étouffer mon impolitesse. 

    Il haussa un sourcil et passa une main dans sa chevelure noire.  

    - On dirait que je me suis trompée, vous êtes toujours aussi impolie. Mais soit... J'aimerais vous engagez.  

    - Comment?  

    Il se tourna vers le balcon, pour voir le paysage: un paysage de montagne couvert par de la verdure. 

    - Mais enfin je... j'ai perdu le duel. Pourquoi? 

    Il se tourna vers moi avec le plus grand des sérieux.  

    - Parce que vous êtes une perle rare Hanae, il fit rouler mon prénom dans sa bouche. Je ne peux laisser partir un talent comme celui-ci.  

    - Qu'est ce que j'y gagne?  

    - Un toit où loger. 

    - Ça ne m'intéresse pas. 

    Il me toisa hautainement.  

    - Vous récupérez le sabre, je vous l'assure. Mais pas tout de suite. 

    Je le regardais droit dans ses yeux noirs, intéressée par ces propos.  

    - C'est-à dire? Quand pourrais-je le récupérer? 

    Il fit un sourire qui me retourna l'estomac tellement il me mettait mal à l'aise. 

    - Quand je jugerais que vous êtes complètement soumise à l'Empire.  

    Mon sang se glaça. 

    - C'est du chantage. 

    - La vie n'est que chantage, très chère demoiselle. 

    - Vous voulez que je vende mon âme à la souveraineté en sachant pertinemment que je la méprise, dis-je froidement. 

    - C'est une offre à prendre ou à laisser. Vous n'aurez pas une autre chance.  

    - Qu'entendez-vous vraiment par être soumise à l'Empire?  

    - Mourir pour elle s'y elle vous le demande. Effectuer tous ces ordres, tous ces désires.  

    - C'est de la folie. 

    - Votre père avait accepté et signé ce contrat, dit-il en montrant une feuille sortit de nul part. Il y a juste une petite différence entre le contrat de votre père et celui-ci. 

    - Laquelle?  

    J'avais l'impression que cette "petite différence" ferait justement toute la différence.  

    - Eh bien... le contrat de votre père lui ordonnait d'effectuer les ordres de la couronne. Celui-ci est plus personnel, si vous voyez ce que je veux dire. 

    Et je voyais totalement où il voulait en venir: c'était ces ordres que je devrais suivre, les ordres du Prince Anzai. Serais-je prête à vendre ma vie à cette homme si sûr de lui? Pour un simple sabre?  

    - Réfléchissez bien. Ça vous permettra de récupérer le sabre que vous convoitez tant. 

    Ce sabre... J'avais déjà tant fait pour le récupérer, ce serait tellement triste de le laisser tomber maintenant. Alors qu'il était à porté de main.

    - Puis-je lire le contrat? 

    Il me le tendit, un sourire aux lèvres, ou plutôt la victoire aux lèvres.  

    Je lus le contrat avec attention et c'était bien ce que je craignais: je devrais être à son service. Je ne devrais rien refuser. Je devrais donner ma vie pour lui, pour le sauver si il le fallait. Et je ne pouvais pas partir, pas m'enfuir, sous peine de mise à mort. 

    - Combien de temps ça durerait?  

    - Toute votre vie.  

    Je laissais tomber le contrat, trop offusquée. 

    - Mais vous êtes fou ma parole!  

    - Surveillez votre langage, je vous pris. J'ai déjà été bien trop généreux avec vous.  

    - Ceci n'est pas la question. Je ne veux pas servir un homme tel que vous toute ma vie!  

    - Si vous étiez entrée dans la garde ça aurait été exactement la même chose à la seule différence que vous seriez au service de mon père. Vous avez eu un aperçu de son caractère pour le moins... difficile. Mais vous avez quand même tenté votre chance. Je vous propose exactement la même chose mais sous mes ordres, est-ce si compliqué?  

    Vu sous cet angle il avait complètement raison..  

    - Donnez-moi de l'encre. 

    - Vous avez prit la bonne décision.  

    Il tira sur une corde, près de la porte, qui déclencha une cloche. Un serviteur arriva et le prince lui fit parvenir ma requête.  

    Mes mains étaient moites. Aucun de nous deux ne parlaient. Même si je regardais le sol, je pouvais imaginer son léger sourire vainqueur. Mon ventre bouillonnait de rage de me retrouver dans une situation comme celle-là. Mes yeux piquaient. Sans parler de mon coeur qui menaçait de s'arrêter. 

    - L'encre.  

    Je sursautais, je n'avais pas entendu le serviteur arriver, trop perdu dans mes pensées. Je posais le contrat sur la table, et pris le pot d'encre et le pinceau. Je m'installais sur le cousin et trempais doucement le pinceau dans le liquide noir. 

    J'approchais ensuite le pinceau de la feuille avec une certaine appréhension. J'avais l'impression de vendre mon âme aux démons, c'était vraiment étrange. Une goûte d'encre tomba sur le contrat, bientôt effacer par ma signature. 


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